Bienvenue chez toi, Rudy Moury (partie 1)

5 novembre 2010

La superstition vient de la nuit des temps.
Nous avons tous en chacun de nous une petite part de superstition.
Qui n’a jamais vu ces joueurs qui se signent en montant sur la pelouse en choisissant bien quel pied avancer en premier.
Il y a ceux qui jouent avec les mêmes sous-vêtements, qui embrassent le crâne dégarni de leur gardien de but, qui ont leur numéro fétiche.
Rappelez-vous de Bertrand Laquait, qui avait fait changer la voiture avec laquelle il venait au stade les jours de match car la couleur avait un effet néfaste sur lui.
Les exemples foisonnent, des plus petites divisions amateurs au top mondial, chaque joueur a son gri-gri, son rituel, sa croyance.
La superstition fait partie intégrante du monde footballistique.

Ce préambule expliquera l’état d’esprit dans lequel nous nous trouvons à l’heure de recevoir notre invité, le très charismatique Rudy Moury.
Il arrive à 19h, c’est l’heure à laquelle il devait terminer son travail à Thuin mais, afin d’être exact au rendez-vous que nous nous sommes fixé, sa gentillesse lui dictera de commencer sa journée une heure plus tôt.
La poignée de main est cordiale, le sourire au rendez-vous, il ne nous quittera pas tout au long des 5 heures passées ensemble.
Ce jeune homme de 44 ans a conservé un physique d’athlète, c’est troublant comme les années semblent ne pas avoir de prise sur lui.
Il porte un pull de couleur verte, couleur d’espérance, la soirée commence sous de bons auspices.
Ce sentiment sera renforcé dés notre installation autour de la table numéro 17, le numéro que portait notre légendaire gaucher.
« – C’est Monsieur Spaute qui m’avait fait venir à Charleroi.
Il était au stade toute la semaine mais, dés le week-end, il suivait beaucoup de matchs dans les divisions inférieures et notamment la division 3.
Il se renseignait auprès des journalistes qui n’hésitaient pas à lui indiquer des futurs talents à dénicher.
Je pense qu’à l’époque, le fossé qui sépare les deux premières divisions des suivantes était moins profond que maintenant.
C’est ainsi qu’il avait découvert Christian Vavadio, Marco Casto, Eric Van Meir, des joueurs dont le nom est resté vivant à Charleroi.
La division 3 était un véritable apprentissage avant de franchir le palier vers l’élite.
Il allait même parfois plus bas, Dante Brogno venait de Marchienne, Philippe Albert de Bouillon mais je ne pourrais pas citer tous les joueurs qui doivent leur carrière à Monsieur Spaute.
Moi, il est venu me visionner une dizaine de fois aux Francs Borains et j’ai su le convaincre de me prendre avec lui.
Un an ou deux avant, j’aurais pu aller au Cercle de Bruges mais le président Zarzecki avait refusé de me laisser partir.
Comme il n’y avait pas encore l’arrêt Bosman, nous, les joueurs, étions les prisonniers des dirigeants.
Finalement, le Sporting m’a acheté pour 2,4 millions de francs belge (60.000 €), c’était une bouchée de pain.
J’ai hérité du numéro 17, pas par fantaisie ou coquetterie, il y avait 22 joueurs dans le noyau et comme j’étais dans les derniers arrivés, provenant de division 3, de surcroît, cela n’avait pas d’importance.
Il est devenu un de mes chiffres fétiches mais quand Luka Peruzovic est arrivé il a exigé que les titulaires portent les numéros de 1 à 11 et c’est ainsi que j’ai eu le 2 et le 5 par la suite.

A suivre…