"Après les années dans les équipes des jeunes, j’ai commencé en 1970 dans une équipe de 6e division près de Bonn où j’ai marqué plus de 35 buts par saison.
Au mois de mars 1972, j’ai eu la chance de jouer un match amical avec une sélection du Moyen Rhin contre le FC Cologne et un autre match contre le champion des juniors UEFA allemands du Kickers Offenbach. Après ces deux rencontres, j’ai reçu des offres de quatre clubs de Bundesliga dont le FC Cologne, qui par sa situation géographique fut idéal pour moi. En plus, à Cologne, les dirigeants me connaissaient très bien.
Après ma première année au FC Cologne, vice-champion et en finale de la coupe d’Allemagne, je suis parti à Eupen pour deux ans.
Mais un an plus tard, après cette merveilleuse saison 73-74 d’Eupen, le Sporting de Charleroi est venu m’acheter, et je suis resté à Charleroi de 1974 à 1980.
Mes deux années au Racing Jet (1980-82) ne furent pas une erreur, mais je pense après tout que la mentalité à Bruxelles, surtout l’indifférence de cette grande ville et de ses habitants ne me plaisait pas tellement, et je n’ai jamais eu le rendement sportif dont j’étais capable.
Après mon retour en Allemagne, j’ai fini mes études et en, dans le même temps, j’ai joué en troisième division. D’abord deux ans à Bad Honnef puis trois ans au Bonner SC.
Sur le plan sportif, ce furent vraiment cinq grandes années. Puis en 1987, j’ai décidé d’arrêter le football et de me retirer du terrain.
Les souvenirs qui m’ont marqué le plus furent les grandes émotions du public au Sporting. Que cela soit la déception et la tristesse en cas de défaite, ou la joie et le bonheur des supporters quand on gagnait, tout cela fut extraordinaire et inoubliable pour moi. Je n’ai jamais vécu cela ni avant le Sporting ni après. Notre équipe et le public formaient une véritable union presque comme des amis.
En ce qui concerne le football j’ai connu quelques très beaux moments au Sporting. Mais bien sûr, la qualification contre le FC Bruges pour la finale en coupe de Belgique en 1978 et surtout nos deux matches contre Anderlecht dans la même compétition en huitième de finale furent de tous grands moments dans la vie de nous tous. Surtout, car nos deux adversaires à ce moment là jouaient un rôle important au niveau européen du football.
Des anecdotes, il y en avait, bien sûr. Mais la plupart vont certainement sur le compte de Felix Week et cela ne serait pas bon ni honnête d’en parler trop. Felix Week par sa manière, ses gestes et sa langue mélangée entre français, flamand et je ne sais plus quoi encore, plus son dialecte bruxellois fut fort vulnérable, parfois ridicule. Nous nous sommes bien amusés avec lui. Le contenu de ce qu’il nous a raconté parfois n’intéressait personne et beaucoup de nous ne l’ont toujours pas compris.
Mes débuts au Sporting furent le derby contre l’Olympic. Comme je m’étais blessé au premier match du tour final, avec Eupen, contre St. Trond, j’avais traîné cette grave blessure à la cuisse droite pendant plusieurs mois et je n’étais jamais, jusqu’au mois d’octobre 1974, en possession de toutes mes forces. Donc mon premier match fut très médiocre, plutôt mauvais et nous avons fait match nul.
J’ai toujours essayé de tirer et garder au maximum les côtés positifs d’un entraîneur qui nous a entraînés, que cela fût pendant quelques années (Week), pendant un an (Anoul, Colonval) ou même moins (Horvat). Au Sporting en six ans, j’en ai connu cinq.
Pol Anoul ne m’aimait pas et il me l’a dit carrément au début. Je ne savais pas pourquoi. Mais il m’a respecté et je l’ai respecté aussi. C’était tout. Tactiquement, il était très fort.
Jean Paul Colonval m’a donné la force et la condition physique, la présence physique sur le terrain et la frappe de balle. Son entraînement était magnifique.
Felix Week n’était pas un grand entraîneur à mon avis. Néanmoins, il savait me motiver au maximum. Je ne sais plus comment il l’a fait, mais avec lui comme entraîneur, je fus capable de tout. Son malheur, finalement, était son aveugle confiance et son amitié avec J. M. Coyette. Week ne fut que son homme de paille, et quand cela ne marchait plus, Coyette a laissé tomber Week d’un jour à l’autre. Comme Coyette, d’ailleurs, le pratiquait avec tout le monde.
Horvat, malheureusement, fut malade. Il avait de grands problèmes d’alcool. Dès le premier jour au Sporting, il arrivait complètement alcoolisé aussi bien à l’entraînement qu’ aux matches. Cela ne pouvait pas réussir, et donc les deux mois avec Horvat étaient perdus pour nous, pour le club et pour lui-même également
Jean Piccinin fut un ami pour moi et pour nous tous. Peut-être un peu trop doux dans ses décisions, mais toujours juste, sincère et authentique. Je suis encore aujourd’hui convaincu que le Sporting ne serait jamais descendu en 1980 si Coyette n’avait pas remplacé Piccinin par Horvat afin de remplacer Horvat deux mois plus tard par Piccinin.
Les joueurs du Sporting qui m’ont marqué furent bien sûr Bobby, Charly et, au début, en 1974 G. Bertoncello.. Bobby et Berto faisaient du grand cinéma, mais en même temps cela fut du grand sport. Techniquement, ces deux joueurs restent inoubliables pour moi. Charly m’a toujours impressionné par sa vitesse, par son courage et par sa force de frappe.
Avec Mathy et Sumera, le Sporting possédait aussi deux gardiens de but extraordinaires qui figuraient tous les deux pendant des années parmi les meilleurs de notre championnat.
Le football a évolué. Sur le terrain, ce sont bien sûr les différentes tactiques, la défense sur une ligne, le football de sécurité en premier lieu. On ne joue pratiquement plus avec un seul contact, c’est-à-dire en un temps. Presque tous les buts, au moins en Allemagne, arrivent à la suite d’une phase arrêtée. L’individualité d’un joueur, la force et la classe individuelle n’est plus tellement demandée. Des buts sur un effort individuel, on ne les voit qu’au très haut niveau européen. Et assez rarement. Sur 90 minutes, souvent, on s’ennuie aujourd’hui, tellement il ne se passe pas beaucoup dans les deux rectangles. De mon temps, cela fut autrement.
En dehors du terrain à mon avis, ce sont les énormes sommes d’argent qui commencent à détruire l’esprit de ce sport magnifique.
Un seul en ce qui concerne mes 9 années en Belgique. Je regrette d’avoir croisé le chemin de Jean-Marie Coyette. Ce fut un type malhonnête et faux qui n’aimait pas le football. Il n’aimait que lui-même ; la gloire et le pouvoir.
Au cours de trois, quatre ans, il a réussi de détruire toute notre merveilleuse équipe pour son propre intérêt. Le bien du Sporting ne lui a jamais intéressé.
À part cela, je pense que si on a trop de regrets alors on n’a pas compris la vie, et on ne veut pas accepter sa vie. Quant aux années au Sporting entre 1974 et 1980, je n’ai pas de regrets sportifs. Sauf peut-être ce match raté contre Beveren. Cela fut dur, mais c’est la vie aussi.
Comme je l’ai déjà dit, nous avons réalisé de grands matches dans ce parcours avec des victoires autant méritées. Je me suis mille fois demandé par après, comment nous avons pu perdre la finale contre Beveren où, il faut l’avouer, je n’ai vraiment pas bien joué. Pourquoi ? Je n’en sais rien.
Lors de ma première saison à Cologne, j’avais joué 22 matches en première et 3 matches en Coupe d’Europe, malgré tous les joueurs internationaux du club. Pour la saison 1973-74, le club avait annoncé l’arrivée de deux autres internationaux et l’entraîneur m’a dit pendant un voyage au Japon, qu’à son avis, j’aurais difficile d’avoir ma place dans l’équipe, car j’étais encore trop jeune. Comme je voulais surtout jouer et comme j’avais envie de partir dans un pays étranger, et comme j’aimais tellement la langue française, et tout ce qui était francophone, je trouvais que la Belgique n´était pas trop mal choisie pour ma première étape à l’étranger. Finalement, j’y suis resté pendant neuf ans.
Je crois que les supporters du Sporting aimaient et aiment le club bien sûr, et de mon temps ils ont aussi aimé et apprécié les joueurs. Ils ont très vite compris que le Sporting était devenu mon club et que j’avais envie de rester et leur redonner un sport sincère et propre. Bobby, Charly, Sumera, Mathy et beaucoup d’autres, moi inclus, avons connu cette fidélité pour notre club que probablement s’est perdue depuis beaucoup d’années dans le monde du sport. Cela fut une affaire de cœur pour nous. Je pense que la plupart des spectateurs et nos supporters étaient fort sensibles à ce point et ils nous ont aimés pour cela.
Signer à Bruges aurait pu être, c’est vrai, un tournant dans ma carrière, mais sincèrement il faut aussi remarquer qu’Ernst Happel d’un côté ne voulait pas donner plus de 20 millions francs belges pour moi et que de l’autre côté ,moi, après cette belle saison 75-76 je ne voulais absolument pas abandonner mes amis au Sporting.
Après ma première saison au FC Cologne, je n’ai pratiquement pas fait de pause. Nous avons préparé la saison 1973-74 au mois de juillet et au même moment, je fus transféré´à Eupen. Donc dès mon premier match à Tongres j’étais à 100% de mes forces. Mes coéquipiers m’ont donné beaucoup de bonnes balles et passes et j’avais la chance de marquer ainsi beaucoup de buts. Et avec chaque but venait une énorme sûreté. J’étais convaincu de pouvoir marquer contre n’importe quelle équipe. En plus de cela, je suis devenu extrêmement calme dans le rectangle. C’est tout le secret et l’explication pour mes buts en deuxième division.
Heureusement, le fils d’André Bauduin m’a retrouvé dans les réseaux sociaux il y a un an d’ici. Cela m’a donné la possibilité et l’occasion de voir beaucoup de mes anciens coéquipiers et amis au début du mois d’août 2017. En plus, Philippe Dewitte m’a offert au même moment cette occasion de rencontrer Bobby après plus de quarante ans d’absence pour son septantième anniversaire. Cela fut un tout grand moment dans ma vie.
Par contre, la mort de Charly il y a quelques années m’a fort touché et m’a rendu très triste.
Il y a dix ans, à peu près, j’ai croisé sur la piste de ski à Saint Moritz Roger Henrotay. Le soir, nous avons dîné ensemble et c’était très agréable de s’être retrouvé.
Ici, à Mayence, je suis les nouvelles belges, politiques et sportives, presque tous les jours, par l’intermédiaire d’internet. Mais sincèrement, je suis trop loin de Charleroi et du Sporting pour pouvoir bien juger la situation du Sporting. Et surtout, je ne connais rien de l’intérieur du club. Ce que je peux dire est que l’équipe, cette année joue une toute bonne saison, et j’espère que le Sporting ira très loin et qu’il atteindra au moins une place en coupe d’Europe, si pas plus que cela. Je pense que les supporters et toute la région carolorégienne mériteraient un tel succès, et je vous le souhaite de tout mon cœur.
Après avoir arrêté de jouer au football, on m’a demandé d’entraîner l’une et l’autre équipe de 4ème, 5ème division. J’avais pas mal de succès. Trois montées, une fois sans aucune défaite et beaucoup de beaux moments comme entraîneur. Mais j’ai très vite compris que le poste d’entraîneur à la longue ne serait pas le mien. Après 12 ans, en avril 1999, j’ai arrêté tout cela. Aussi, parce que mon genou gauche n’en voulait plus.
Pendant 20 ans, jusqu’en 2012, j’ai fait du ski.
Depuis 2007, je joue au golf dans un club que la ville de Mayence a construit à 200 m de chez moi.
C’est un merveilleux endroit et un très beau sport. En plus, cela me permet après trente ans d’activité au football de suivre le football en Allemagne, en Belgique et ailleurs en toute tranquillité et sérénité et probablement de revoir mes anciens amis en Belgique, de temps en temps, en toute amitié.
Une sélection de la saison 75-76
Demoor, Roosbeek, Gebauer, Leifson, Bauduin, Heymans, Jacobs
Porignaux, Berwart, Schena, Bohmer, Vermeir, Hadziabdic