Bienvenue chez toi, André Colasse. Partie 3 (fin)

9 septembre 2010

Après Mehdi, nous recevons une petite visite de Mogi.

Nouvelle petite séance photo, bon gré mal gré mais avec le sourire.

Nous reprenons notre conversation et entamons la saison 1984-85.

Bien sûr, pour paraphraser Charles Aznavour, nous vous parlons d’un temps que les moins de …25 ans ne peuvent pas connaître.

Mais, commençons par le commencement et par le match de Gala exceptionnel à l’occasion du 80ième anniversaire du club.

En effet, en ce beau mois d’août 84, le Sporting de Charleroi, équipe de division 2 belge, avait l’insigne honneur de recevoir les  » Reds  » du FC Liverpool.

– Ce jour-là, on a eu droit à une montgolfière que s’élevait du terrain.

Une demi-heure avant le match, les anglais étaient encore en civil et, relax, regardaient les préparatifs du décollage.

Nous on était prêts pour l’échauffement, sérieux comme tout et après un quart d’heure de jeu, c’était 0-3.

C’était une grande équipe, d’ailleurs, pendant que nous jouions le tour final, eux jouaient la finale maudite de la Coupe des Clubs Champions au Heisel face à la Juventus de Platini.

Vous vouliez vraiment monter en division 1 ?

– Evidemment que nous voulions monter !

C’était un objectif depuis le début de la saison pour Jean-Paul Spaute et Gaston Colson.

Je revenais de deux saisons à l’Union St Gilloise, j’étais monté avec eux, consécutivement, de Promotion en Division 2.

Jean-Paul et moi, nous avons tout fait ensemble, nous sommes allé à l’école ensemble, nous avons joué en équipe nationale junior et militaire ensemble.

Pendant 30 ans nous avons été associés en affaire, j’ai notamment eu Herman Van Hoolsbeeck comme délégué commercial à une certaine époque.

En 1984, c’est lui le patron et moi l’employé et ça se passe sans aucun souci.

Il n’y a jamais eu de séparation, c’est moi qui, après trois ans, ai décidé d’arrêter le foot définitivement, du moins c’est ce que je croyais.

Mes affaires avaient pris de l’essor, cela devenait compliqué de combiner toutes mes activités.

J’avais mes bureaux à Bruxelles, j’entraînais ici au Sporting à 17h ou 18h, je préparais mes entraînements dans la bagnole.

L’arrêt n’aura duré que 3 ans car le virus m’a repris par la suite, du coup, je suis allé à Mons, à l’Olympic, etc…

Fin du repas, nous nous dirigeons vers la sortie pour … une petite cigarette.

– Quand j’étais gosse, mes parents fumaient tous les deux comme des dératés et je les maudissais.

Pourtant, je suis tombé dedans à 33 ans et maintenant, je suis un drogué.

Sitôt le mégot écrasé, direction le terrain cette fois.

Là, l’attendent les membres de l’équipe de rcsc.tv pour l’interview diffusée sur la télévision du Sporting.

Et ensuite, le coup d’envoi du match RCSC – AS Eupen.

Pendant qu’il se dirige vers le centre du terrain, il a un regard circulaire vers les tribunes …

– Tu imagines ce stade rempli, quelle émotion.

Pendant le tour final, on a joué trois fois sold-out.

On aurait pu vendre 40.000 tickets, c’était démentiel.

L’atmosphère était exceptionnelle, il y avait de la pression mais c’est ce que je préférais.

Mes plus beaux matchs ont eu lieu sous la pression.

Quand nous allions au Standard ou à Anderlecht, les supporters me criaient dessus, plus ils criaient et plus j’en remettais une couche, j’adorais ça.

C’est, peut-être, suite à cet état d’esprit qu’est venu mon surnom de  » Roquet « .

Mon ami Kevin Pugh, chez qui je vais de temps en temps boire un café, pouvait aussi mériter ce surnom.

Parce que, lui comme moi, nous ne lâchions rien.

Quels sont les joueurs que vous retiendrez de votre carrière d’entraîneur ?

– Au Sporting, Philippe Migeot, un capitaine exemplaire.

Kevin Pugh qui lui a succédé avec le brassard et Didier Beugnies, meilleur buteur de Division 2 en 1984.

Hors-Sporting, j’aimais bien Danny Ost, mais je crois qu’il en fait parfois de trop et que cela pourrait lui jouer des tours (on sait maintenant ce qu’il en est advenu).

Eprouvez-vous encore de la fierté à l’idée que, 25 ans après, le Sporting soit toujours en Division 1 ?

– Une certaine fierté, c’est un bien grand mot.

La difficulté c’est d’y rester, l’année passée nous sommes passé très prêt de la descente.

Il y avait des problèmes dans le vestiaire, mais l’ambiance dans le vestiaire, c’est le boulot de l’entraîneur, c’est lui qui fait le vestiaire.

En 1984, j’avais des garçons qui voulaient jouer, gagner et même perdre ensemble.

Il y avait aussi des gamins, Varrichio, Taïbi et Silvagni, ils avaient 17 ans, ils rappelaient les Bertoncello, Spaute et Colasse.

A l’Union, en 1982, il y avait une équipe de vieux dirigeants qui avaient l’habitude de s’occuper de tout.

Ils étaient dans le vestiaire pour savoir tout ce qui s’y passait.

Quand je suis arrivé, je les ai tous mis dehors et leur disant que je ne voulais pas les voir dans mon vestiaire.

A l’égard des joueurs, Danny Ost était là, je montrais immédiatement qui était le patron.

J’ai failli ne pas commencer la saison, ils m’ont vomi pendant deux ans (rires)

Quand vous voyez le coaching de Jacky Mathijssen, pensez-vous qu’il y a quelque chose de vos méthodes en lui ?

– Non, je pense que chacun a son style.

Il me semble que j’avais l’air plus nerveux que lui.

C’était peut-être la cigarette, elle me permettait d’évacuer un peu le stress.

Maintenant on ne peut plus fumer sur le banc, c’est compréhensible, mais je me serais bien débrouiller pour y arriver.

Quoi qu’il en soit, c’est un métier difficile que le notre.

On ne domine pas les événements, on peut les diriger, on peut améliorer les choses, mais ce sont les joueurs qui ont toujours le dernier mot.

Avez-vous toujours le Sporting dans le sang ?

– Je suis un peu plus détaché, bien que je vienne à chaque match de Charleroi …

André Colasse ne finira pas sa phrase, c’est le moment qu’a choisi Onür Kaya pour inscrire un but magnifique qui mettait le Sporting sur les rails de la première victoire de cette saison.

De toute manière, nous avions notre réponse.

Il suffisait de voir la mine réjouie, les applaudissements et le regard qui suivait le salut du buteur carolo pour comprendre la place que tenait encore le Sporting dans le cœur de cet homme, qui fait partie de notre Histoire en noir et blanc.

Merci Monsieur Colasse, pour votre gentillesse et pour ces moments de grands et beaux souvenirs.